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Le plateau lorrain fait partie du vaste plateau qui s’étend entre le Massif Vosgien et la Côte de Moselle sur les départements de la Moselle, de la Meurthe-et-Moselle et des Vosges. Il présente des reliefs amples et peu marqués, composant des paysages essentiellement agricoles aux grandes ouvertures visuelles.
Il s’appuie sur les coteaux du Grand Couronné qui le domine à l’ouest et s’épanche doucement vers les vallées de la Seille au nord et du Sânon au sud. L’unité de paysage s’allonge du nord au sud sur 45 km environ entre Nomeny et les reliefs dominant Lunéville, pour 3 à 5 km de large.
Elle est limitée à l’ouest par les unités de paysage du Grand Couronné, de l’agglomération de Nancy et de la vallée de la Meurthe, au sud par le Lunévillois et elle se prolonge à l’est dans le département de la Moselle jusqu’à Château-Salins et Dieuze (vallée de la Seille). On peut y distinguer trois parties :
« Le Plateau lorrain […] J’aime le plateau lorrain par-dessus tout. L’uniformité du spectacle favorise ma pensée [...]. Cette immensité aide à la profondeur ; immensité de l’horizon, profondeur de l’âme. »
Maurice Barrès, Mes Cahiers (1957)
Les paysages et l’histoire des salines
Les paysages de cette partie du plateau lorrain, comprise entre la Seille, le Sânon et la Meurthe, gardent les traces de l’exploitation du sel. Dès l’âge de bronze et jusqu’au Moyen-Age, le sel fait la richesse des villes situées dans la vallée de la Seille et surtout dans le Saulnois voisin, avec Nomény en Meurthe-et-Moselle, mais surtout Château-Salins, Salonnes, Moyenvic, Marsal et Dieuze en Moselle. On retrouve également cette exploitation du sel dans la vallée du Sânon avec les salines d’Einville-au-Jard. Aujourd’hui, les chevalements traditionnels en bois ont quasiment disparu. Ils laissent place à l’exploitation moderne par dissolution des gisements de sels Gemme plus riches et situés plus à l’ouest sur le plateau de Haraucourt/Lenoncourt et dans la vallée de la Meurthe (Varangéville).
Le plateau du Saulnois : un plateau doucement ondulé s’épanchant vers la vallée de la Seille et la vallée du Sânon
Le plateau présente des paysages amples et ouverts tirés à l’horizontale et offrant des vues lointaines – Erbéville-sur-Amezule
Sur le plateau, le relief doucement ondulé compose des paysages agricoles ponctués de masses boisées qui soulignent les dépressions et les plis – Xanrey
Le plateau ondulé et agricole offre des vues lointaines – Létricourt
La plaine de Nomény : un plateau s’affaissant en une plaine autour de Nomény, cadrée par les horizons marqués du Grand Couronné à l’ouest et de la côte de Delme à l’est
Autour de Nomeny, la Seille draine une vaste plaine au relief à peine marqué entre les buttes-témoins du Grand Couronné à l’ouest et la côte de Delme à l’est. La teinte rouge des terres grasses, chargées d’oxyde de fer, caractérise les paysages agricoles de la plaine, tirés à l’horizontale – Clémery
La côte de Delme dessine l’horizon est de la plaine de la Seille – Clémery
Les reliefs festonnés du Grand Couronné dessinent la ligne d’horizon de la vallée de la Seille à l’ouest - Ajoncourt
Les vallées de la Seille et du Sânon : des vallées peu marquées cadrées de coteaux souples, présentant des fonds plats tapissés de prairies et de structures végétales qui soulignent le parcellaire et le fil de l’eau (ripisylve, arbres isolés, haies, rideaux d’arbres, saules têtards)
La vallée du Sânon présente un fond plat couvert de prairies et des coteaux le plus souvent boisés - Sommerviller
Des reliefs plus marqués le long des côtes infraliasiques : versant nord de la vallée du Sânon et vallée de la Loutre Noire
Les cours d’eau qui incisent le plateau ont façonné des vallées aux reliefs relativement marqués qui animent les paysages horizontaux : la vallée de la Loutre Noire présente des coteaux cultivés et boisés cadrant un fond plat couvert de prairies – Moncel-sur-Seille
Le village de Moncel-sur-Seille installé dans le fond de la vallée de la Loutre Noire
Les côtes infraliasiques forment les coteaux festonnés couronnés de boisements qui cadrent la vallée du Sânon au nord (à gauche sur la photo) - Maixe
De vastes massifs forestiers et des petits boisements soulignant le relief subtil du plateau et animant les paysages agricoles
Le plateau est ponctué de massifs boisés qui dessinent les horizons des espaces agricoles – Erbéville-sur-Amezule
Les lisières forestières découpées participent à la diversité des paysages - Arracourt
Des paysages agricoles alternant en douceur pâtures et champs labourés en un subtil fondu-enchaîné qui révèle le relief : les cultures s’installent sur les plis tandis que les herbages occupent les légères inflexions du relief
Pâtures et champs cultivés se succèdent en douceur sur le plateau ondulé : les pâtures généralement dans les dépressions et fond de vallées, les cultures sur les pentes et les hauteurs - Arracourt
Une simplification des paysages agricoles par endroits qui efface par endroits la perception des reliefs et uniformise le paysage : dilatation des échelles de perception avec de vastes parcelles agricoles, disparition des herbages au profit des cultures
L’intensification des pratiques agricoles tend à appauvrir et simplifier les paysages : les grandes cultures couvrent le territoire sans distinction, effaçant la perception de la vallée de la Loutre Noire. Le boisement souligne le pli du relief à l’horizon (Bois de Bénamont) - Xanrey
Un maillage dense de villages installés dans les creux sur le plateau ou dans les fonds de vallée
Les villages présentent un habitat groupé et compact - Crévic
Un village niché dans un vallon sur le plateau - Juvrecourt
Une pression urbaine plus forte à l’ouest, aux abords de l’agglomération de Nancy
Un long passé lié à l’exploitation du sel : des installations ponctuelles d’extraction du sel mitant et artificialisant les paysages agricoles du plateau de Haraucourt, un petit patrimoine industriel à préserver (vallée du Sânon)
Le chevalement en bois du puits d’accès à la mine de sel – Saline d’Einville
On peut distinguer deux secteurs différents dans cette unité d’un point de vue écologique : le bassin versant de la Meurthe au sud comprenant plusieurs vallées entaillant le plateau et le bassin versant de la Seille au nord.
Bassin versant de la Meurthe
Le bassin versant de la Meurthe accueille principalement le Sânon, doublé par le canal de la Marne au Rhin, ainsi que la Roanne à l’ouest et le ruisseau de la Loutre Noire à l’est. Il se caractérise dans cette unité par un plateau cultivé et boisé et par une plaine de culture intensive. Le fond de vallée est couvert de prairies et les coteaux sont le plus souvent boisés. Ces milieux diversifiés permettent la présence de diverses espèces de chiroptères tels que les Murins de Bechstein et de Daubenton. Les chauves-souris empruntent la rivière du Sânon ou le canal de la Marne au Rhin comme axe de déplacement d’orientation Est/Ouest pour rejoindre la Meurthe.
Situé au milieu de la grande plaine céréalière, l’étang de Parroy, alimentant le canal de la Marne-au-Rhin, représente une zone refuge pour de nombreuses espèces. Sa roselière est notamment une zone de passage pour les oiseaux et accueille par exemple le Butor étoilé et le Busard des roseaux. Il se trouve à proximité de la forêt de Parroy, qui présente au niveau de sa lisière l’étang de Bossupré.
Bassin versant de la Seille
Le bassin versant de la Seille présente une agriculture plus variée et plus extensive, alternant prairies, pâtures et cultures en complémentarité avec les boisements. La rivière de la Seille, affluent de la Moselle et venant de l’étang de Lindre dans le département voisin, représente une continuité écologique Sud-Est/Nord-Nord-Ouest avec sa ripisylve, en décrivant de nombreux méandres au pied des buttes témoins des Côtes de Moselle. L’intérêt de la Seille passe par sa capacité à inonder les prairies environnantes. Plusieurs zones de prairies humides et de pâturages mésophiles forment des continuums écologiques le long de la Seille et sont inventoriées en ENS et en ZNIEFF. Le site sert de lieu de chasse aux rapaces nichant en bordure de prairies. Les prairies inondables sont favorables à une faune et une flore spécifiques, dont les insectes, les batraciens et les oiseaux (Courlis cendré, etc.).
Autour de Bézange-la-Grande, les vallons frais situés en forêt autour des ruisseaux affluents de la Seille accueillent une faune et une flore particulièrement riches étant donné le climat frais et humide, avec la présence floristique de la Nivéole printanière. Les mardelles régulièrement disséminées accueillent des batraciens sylvicoles.
L’étang de Brin est entièrement inclus dans la forêt domaniale d’Amance et est relié au réseau hydrographique grâce au ruisseau de l’étang, affluent de la Seille. Il existe peu d’étangs à faible distance mais des échanges sont vraisemblables avec les nombreux étangs situés en Moselle, la vallée de la Seille étant à cheval sur les deux départements. L’habitat aquatique combiné aux milieux forestiers permet l’accueil des amphibiens et des oiseaux de roselière.
légende de la carte d'analyse critique
Atouts :
Les fonds de vallées : des éléments de diversité paysagère grâce aux prairies et structures végétales qui révèlent, dans un délicat fondu-enchaîné, les inflexions du relief par un passage progressif des prairies (dans les fonds), aux cultures (sur les plis)
Les ceintures végétales des villages (prés-vergers, jardins) : des espaces de transition précieux entre les zones habitées et les paysages agricoles de grandes cultures
La ceinture végétale qui entoure le village accompagne agréablement le bâti - Rouves
La silhouette du village est accompagnée d’un écrin végétal formé par les vergers – Erbéville-sur-Amezule
Les prés-vergers qui ceinturent le bâti participent à la qualité de la silhouette du village et à son inscription en douceur dans le paysage agricole - Juvrécourt
Les structures végétales (bois, arbres isolés, alignements, ripisylves, …) sur le plateau et dans les fonds de vallée dans la partie Nord de l’unité paysagère : des facteurs de diversification et de qualité paysagère, des refuges pour la biodiversité
Les structures végétales participent à la qualité des paysages agricoles du plateau et jouent également un rôle écologique important – Valhey
Alignements de mirabelliers valorisant l’entrée du village – Réchicourt-la-Petite
Les villages : un habitat concis et bien lisible dans le paysage, un patrimoine rural et architectural à valoriser
L’imbrication du végétal et du bâti donne une image valorisante des centres des villages – Rouves
La Seille offre une ambiance verdoyante : berges enherbées, plantations. Toutefois la relation bâti/rivière est aujourd’hui une zone de stationnement et pourrait être valorisée - Nomeny
Un mail de tilleuls valorise l’espace public du village – Chenicourt
Exemple intéressant d’aménagement d’un centre de village : réduction de l’emprise de la chaussée, circulations piétonnes, organisation du stationnement, réservation de zones plantées – Sommerviller
Aménagement des berges du Sânon – Einville-au-Jard
Fontaine-abreuvoir en grès rose annonçant la transition vers les Vosges gréseuses – Einville-au-Jard
Les usoirs enherbés et plantés participent à la qualité des espaces publics – Réchicourt-la-Petite
Les points de vue : depuis les routes-paysages, les rebords de plateau, les buttes, qui permettent une découverte et une appréhension large des paysages
Point de vue sur la vallée du Sânon depuis le rebord des côtes infraliasiques ; les horizons boisés sont ceux de la forêt domaniale de Parroy - Parroy
Les canaux : supports d’itinéraires de découverte des paysages
Le canal de la Marne au Rhin, une voie d’eau utilisée pour la navigation de plaisance, un axe de découverte original des paysages de la vallée du Sânon - Crévic
L’agriculture extensive familiale dans le fond de vallée de la Seille, intéressante d’un point de vue écologique et paysager
Fragilités :
La pression urbaine de l’agglomération de Nancy, qui se traduit par une banalisation de la structure des villages situés au nord-ouest : extensions standardisées, urbanisation linéaire le long des principaux axes de communication et mitage de l’espace agricole
Mitage de l’espace agricole par un bâtiment d’activités fragilisant l’image du paysage agricole – Le long de la RN74 entre Champenoux et Mazerulles
Un quartier récent mal raccordé au tissu existant du bourg – Einville-au-Jard
La simplification des espaces agricoles par l’intensification des pratiques agricoles, notamment dans la plaine de Nomény et autour de Parroy : suppression des structures végétales, remembrement en grandes parcelles pour la céréaliculture, supprimant les corridors écologiques pour le déplacement des espèces
La suppression des structures végétales simplifie et appauvrit les paysages et la biodiversité - Valhey
La consommation des ceintures vertes des villages construction de hangars agricoles à l’extérieur des villages sans accompagnement végétal, urbanisation et/ou à l’enfrichement des prés-vergers et jardins par défaut de gestion suite à l’abandon des pratiques agricoles traditionnelles
Silhouette de village dévalorisée par la construction de hangars agricoles au-delà de la ceinture végétale qui entoure le bâti ancien - Rouves
L’artificialisation des paysages agricoles par les activités d’exploitation du sel, notamment sur le plateau d’Haraucourt : sondages, trous d’eau, pistes d’exploitation, clôtures, …
L’exploitation du sel par sondages marque les paysages agricoles – Cerville
Les bâtiments liés à l’exploitation du sel - Cerville
L’enrésinement et la plantation de peupliers dans les vallons